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14 avril 2010

Une lecture à partager

L'histoire, magistra vitae              

              Ne considérer l'histoire que comme un amas immense de faits qu'on tâche de ranger par ordre de dates dans sa mémoire, c'est ne satisfaire qu'une vaine et puérile curiosité qui décèle un petit esprit, ou se charger d'une érudition infructueuse qui n'est propre qu'à faire un pédant. Que nous importe de connaître les erreurs de nos pères si elles ne servent pas à nous rendre plus sages? Cherchez,Monseigneur, à former votre cœur et votre esprit. L'histoire doit être pendant toute votre vie l'école où vous vous instruirez de vos devoirs. En vous présentant des peintures vives de la considération qui accompagne la vertu, et du mépris qui suit le vice, elle doit un jour suppléer aux hommes qui cultivent aujourd'hui les heureuses qualités que la nature vous a données.

              On ose aujourd'hui vous montrer la vérité; on ose tantôt mettre un frein à vos passions naissantes, et tantôt secouer cette pesanteur naturelle qui retarde notre marche vers le bien; mais un jour viendra, et il n'est pas loin, Monseigneur, qu'abandonné à vous-même, vous ne trouverez autour de vous aucun secours contre des passions d'autant plus fortes et plus indiscrètes,que vous êtes plus élevé au-dessus des hommes qui vous entourent. Vous ne connaissez pas le malheur, je dirais presque la misère de votre condition. La vérité, toujours timide, toujours fastidieuse,toujours étrangère dans les palais des princes,craindra certainement de se montrer devant vous. Redoutez, Monseigneur, ce moment de votre indépendance. Quand je vous l'ai annoncé comme prochain, si vous avez éprouvé un sentiment de joie et d'impatience, je dois vous avertir que vous devez redoubler d'attention pour ne pas échouer contre l'écueil qui vous attend. Triste et malheureux effet de votre grandeur! Vous serez environné de complaisants à gages qui épieront incessamment vos faibles,et dont la funeste adresse vous tendra des pièges d'autant plus dangereux, qu'ils vous paraîtront agréables. Pour vous dominer impérieusement, ils iront au-devant de vos désirs; ils tâcheront, avec autant d'art que de constance, de vous rendre esclave de leurs passions en feignant  d'obéir aux vôtres. Si vous les croyez, vous serez tenté de vous croire quelque chose de plus qu'un homme et dupe de vos courtisans, vous vous trouverez rabaissé même au-dessous d'eux.

           A la voix insidieuse de la flatterie, opposez les réflexions que vous fournira l'histoire. Elle vous apprendra, si elle n'est pas écrite par la plume prostituée de nos écrivains modernes, que la vertu ne doit pas être un exercice plus commode et plus facile pour les princes que pour les autres hommes. Elle vous dira au contraire que plus vos devoirs sont étendus, plus vous devez livrer de combats et faire d'efforts pour les remplir. Elle vous avertira que né,comme tous les hommes, avec un commencement de toutes les passions, vous devez craindre qu'elles ne vous conduisent aux plus grands vices; elle vous dira que chaque vice du prince est un malheur public       (De l'étude de l'histoire, pp.11-13).

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